Mise en ligne le 2 septembre 2002
Jacques Pineau est un responsable d'AlMA dans le Tarn
1er leçon : Sainte Canicule
Le drame, quel qu’il soit et surtout s’il devient une affaire publique, doit avoir un ou des responsables, c’est la loi des médias, est-ce la nécessité de nos consciences ?
La canicule et ses effets ont fait fonction d’un réel révélateur de la situation des personnes âgées dans notre société.
Que devons-nous en penser ?
Question médicale ? Question politique ? Question financière ?
Question d’information ? Question de bon-sens ?
Certes un système a besoin d’informations pour réagir, tant il est vrai que nous réagissons aujourd’hui comme notre ordinateur qui ne peut fonctionner que si nous lui fournissons certaines info adéquates ….je me suis laissé dire qu’un des multiples dispositifs de veille dont disposent les organes décisionnels réagissait au terme sécheresse forcément inscrit dans ses disques durs, mais canicule étant inconnu, il n’y avait pas eu d’alerte.
Alerte, mot sacralisé qui signifie de fait que si le voyant rouge ne s’allume pas, personne y compris moi ne réagira…
Arrêtons de faire automatiquement confiance à des organes abstraits, virtuels, artificiels qui pourraient nous entraîner à ne plus penser voire ne plus sentir par nous-mêmes.
Car après tout, cette immense chaleur qui nous faisait quotidiennement rechercher l’ombre, la fraîcheur, l’eau, et autres lieux et produits capables de nous permettre de supporter la situation, nous l’avons vécu, ressenti par toutes les intimes pores de notre corps. Alors ?
Qu’est ce qui nous a empêchés de penser que nous n’étions pas les seuls à vivre ce séisme atmosphérique ?
Qu’est ce qui nous a conduits à croire que nous étions des individus face à un destin individuel ?
Qu’est ce qui nous a amenés à nous démerder seuls, en confirmant quand même dans nos communications avec les autres que la chaleur nous pesait à tous
« il fait chaud chez toi ? » « plus de 40° aujourd’hui, je suis resté enfermé, et chez vous ? »
Dans ce cas attendions –nous une réponse vraie ou simplement la confirmation que nous n’étions pas les seules victimes d’une quelconque malédiction solaire ?
Si telle était notre disposition d’esprit, alors oui nous aurions du être averti.
Par qui ? Les autorités, les décideurs qui eux-mêmes auraient du être averti par les dispositifs d’alerte, de veille, de vigilance, que dans son immense sagesse déresponsabilisante la collectivité à mise en place pour nous alerter, nous faire veiller à … quoi au juste…
à croire à ce que nos sens nous disent !
à penser vraiment à nos voisins, amis !
à me dire je ne suis pas seul !
Drôle d’alerte ! Quoique ! Pourquoi pas nous réveiller de notre inertie individuelle ?
Comment ? Aurions nous pu agir personnellement ?
Savions-nous qu’il existe des vieux dans les hôpitaux et maisons de retraite ?
Savions-nous que tel voisin à plus de 70 ans vit seul ?
Savons nous nous tenir à l’ombre, au frais, nous réhydrater régulièrement ?
Oui …alors de quelle alerte avions-nous, avons-nous réellement besoin ?
Certains diront que je fais ici l’impasse sur le besoin des personnes âgées et dépendantes… sur leur déficience en soif…etc.
Mais il y a des centaines de personnes qui s’occupent d’elles et savent…alors moi !…
Moi, merci ça va j’ai survécu … ma maman 93 ans aussi… plusieurs ont veillé à ce qu’elle boive régulièrement…
Alors ! Pourquoi je fais ce papier ?
Toi qui me lis, tu le sais sûrement dans ton fort intime.
N’attendons pas tout d’ailleurs, de l’administration et des pouvoirs publics,
l’éthique, même de responsabilité est avant tout personnelle.
Je reste persuadé que chacun sait, de sa place, ce qu’il a fait ou aurait pu faire…avec ou sans dispositif d’alerte.
C’est peut-être pour cela que nous sommes si mal à l’aise.
Sainte Canicule réveille-nous !
Jacques Pineau
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pour Bernard Pradines
