mise en ligne le 30 octobre
2005
mise à jour le 9 mars
2022
Comment s’adresser
à un malade présentant des troubles cognitifs sévères
Texte rédigé
par l'auteur de ce site en s’inspirant des publications de Small JA.
Small et al. étudient le langage et la communication dans la maladie
d'Alzheimer en observant et évaluant sur le terrain les stratégies utilisées
par les aidants. Je me suis inspiré essentiellement de ces études pour
préciser notre propre attitude dans ces situations.
1. Éliminer
les facteurs de distraction, par exemple la télévision ou la radio. Au mieux,
le dialogue aura lieu seul à seul dans une chambre ou un bureau.
2. S'approcher
du patient lentement et de face, créer et maintenir un contact visuel avec le
regard du malade. Pour ma part, je me place de préférence au même niveau que
lui, le plus souvent en position assise. Mon visage est éclairé par
la lumière. Il convient aussi de rester dans le champ visuel de la
personne interrogée. Pour cela, il faut se situer au mieux au centre du champ
visuel présumé. En effet, le rétrécissement du champ visuel se combine souvent
aux difficultés de rotation du rachis cervical.
3. Utiliser
des phrases simples et les plus courtes possibles, comportant les mots les plus
simples. Les questions positives sont mieux comprises. Par exemple :
"avez-vous mal ?" plutôt que : "n'avez-vous pas mal ?"
4. Poser une
seule question ou ne donner qu'une seule instruction à la fois. En pratique
attendre la réponse avant de poser une autre question.
5. Poser des
questions fermées qui appellent une réponse par "oui" ou
par "non". Si l'on doit recourir à des questions ouvertes,
celles qui font appel à la mémoire
sémantique sont mieux comprises que celles qui se rapportent à la mémoire
épisodique (Small JA, 2005).
6. Répéter les
messages en utilisant les mêmes mots, mot à mot, en articulant bien. Pour
résumer, le langage du "prêtre dans son église" me semble opérant.
7. Reformuler
les messages en utilisant des paraphrases (selon l'Encyclopædia
Universalis 2004, pour notre propos,
"paraphrase" : développement explicatif d'un texte,
amplification verbeuse d'un texte, synonyme).
8. Éviter
d'interrompre le sujet et lui accorder tout le temps nécessaire pour répondre.
9. Encourager
le sujet à approcher verbalement ou à décrire le mot qu'il est en train de
chercher, encourager les circonlocutions (selon l'Encyclopædia
Universalis 2004, "circonlocution" :
façon de parler par périphrases, de manière indirecte.
"Périphrase" : remplacement d'un mot par une expression ayant le
même sens, façon d'exprimer sa pensée de manière indirecte.
10. Parler
lentement. Cette attitude semble toutefois moins performante que la répétition
et l’utilisation de paraphrases (Small JA, 2003).
11. Joindre le
geste à la parole, par exemple en désignant du doigt une zone suspecte de
douleur.
A tort ou à
raison, je tente d'imiter l'accent du résident quand il en possède un, par
exemple celui de Paris (chacun sait que nous n'avons aucun accent dans le Sud
de
Les stratégies
qui ont montré selon Small une amélioration de la communication sont
l'élimination des éléments de distraction et la simplification de la structure
de la phrase et des questions. Ces attitudes s'apparentent aux échanges verbaux
en français lorsque notre interlocuteur ne maîtrise pas notre langue et que
nous ne maîtrisons pas la sienne. A déconseiller aux personnes pressées ou
impatientes.
Ces données
sont un argument supplémentaire en faveur de l'EVS (échelle verbale simple
utilisant des qualificatifs) dans l'évaluation de la douleur.
Bibliographie :
Rousseau T, Gatignol P. L'apport de l'orthophonie in : Alzheimer. Vivre
avec la maladie et la comprendre. L'ESSENTIEL. Cerveau et Psycho. Février-Avril
2013.
Small J. A.
Langage et communication dans la maladie d'Alzheimer in Maladie d'Alzheimer et
déclin cognitif. Serdi édition, 2002, pp 141-146.
Small JA.
Stratégies de communication dans la prise en charge d'un patient atteint de
maladie d'Alzheimer : recommandations et mises en application. In Maladie
d'Alzheimer et déclin cognitif. Recherche et pratique clinique. Volume 9. Edition Française. Serdi Edition,
Springer Publishing Company, 2004, pp188-92.
Small JA, Gutman G, Makela
S, Hillhouse B. Effectiveness of communication strategies used by caregivers of
persons with Alzheimer's disease during activities of daily living. J Speech
Lang Hear Res. 2003 Apr;46(2):353-67.
Small JA, Perry J. Do you remember? How caregivers
question their spouses who have Alzheimer's disease and the impact on
communication. J
Speech Lang Hear Res. 2005
Feb;48(1):125-36.
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